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Cet article a été publié par l'Écho de Cantley juin 2014, Volume 25 no 11. L'Écho de Cantley a explicitement autorisé la publication de ces articles pour l'information et le plaisir nos lecteurs.

Ils disaient que c'était impossible - Cantley 1983-1989

par Bob McClelland, traduction par Marie-Josée Cusson

Le 17 mars 1983 est une date importante dans l'histoire de Cantley. Ce soir-là, 400 contribuables en colère se sont entassés à l'école Sainte-Élisabeth pour se plaindre aux conseillers municipaux de Gatineau des énormes hausses de taxes à répétition et de l'ABSENCE de services en retour. Arthur Pomeroy, résidant de longue date, avait vu ses taxes pour sa ferme du chemin River passer de 300 $ en 1978 à 872 $ en 1979, puis à 1 426 $ en 1981. La plupart des résidants étaient dans la même situation.

La pagaille avait été semée dans les années 1960, lorsque des centaines de maisons avaient été construites au nord de la municipalité de Hull-Ouest, dans un quartier qui s'appelle maintenant « Touraine ». À cette époque, les petites municipalités du Québec n'avaient pas de subdivision, alors tous les conseillers et tous les pouvoirs étaient concentrés au sud. En 1973, la situation s'est détériorée davantage, lorsque la municipalité s'est jointe à la Ville de Gatineau.

En 1983, le secteur de Cantley n'était pas protégé efficacement contre les incendies. La caserne la plus proche était à 16 km de l'école Sainte-Élisabeth. Les routes étaient dans un état pitoyable et le secteur n'avait pour seule installation récréative qu'une patinoire extérieure. La Ville de Gatineau avait des dettes colossales; les résidants de Cantley payaient des services dont ils ne profiteraient jamais, dont des services d'aqueduc et une nouvelle usine de traitement des eaux usées.

Lors de cette réunion, l'idée d'une municipalité indépendante a refait surface. Ce n'était pas la première fois que cette idée faisait l'objet de discussions. Des bénévoles très entreprenants ont donc formé un comité, qui avait à sa tête Bertrand Boily. En août 1983, le comité a publié le Document no 1. Ce document démontrait que les Cantléens payaient deux ou trois fois plus de taxes que les citoyens de Chelsea ou de Val-des-Monts et que le secteur rural de Gatineau représentait 74 % de la superficie totale de la ville, mais seulement 7 % de sa population. Le comité a également fait circuler une pétition : des 1 877 résidants sondés, 1 660 personnes (91 %) étaient en faveur de la séparation. Les documents ont alors été présentés à la ministre qui était à l'époque responsable de l'Outaouais au sein du gouvernement du Parti québécois, Pauline Marois.

Entre 1984 et 1986, d'autres réunions, du lobbying et des milliers d'heures de bénévolat ont fait avancer la cause. Le comité a déposé un budget de « l'an un » pour Cantley, qui s'élevait à 1,1 million de dollars, et a payé des comptables agréés pour le vérifier. Pendant tout ce temps, les médias suivaient avec beaucoup d'intérêt ce qu'ils appelaient « l'affaire de Cantley ». Tous savaient ce qu'il fallait faire, mais aucun politicien à l'échelon municipal ou provincial n'avait le courage d'agir. Lorsque les Libéraux ont remporté les élections provinciales de 1985, le député provincial Michel Gratton a promis de régler l'affaire de Cantley, ce qu'il n'a jamais fait.

En 1986, Jacques Parizeau a dirigé une Commission dont le mandat était d'étudier le rôle des municipalités. Des représentants de Cantley y ont fait une présentation, pour suggérer que les secteurs ruraux de villes telles que Gatineau et Aylmer soient regroupés avec d'autres municipalités rurales,comme Chelsea et La Pêche. Des années plus tard, avec la création de la MRC des Collines et la séparation des zones urbaines et rurales, bon nombre des idées suggérées par Cantley ont été adoptées. En 1986, la question du dépotoir est également entrée en scène. La région était à la recherche d'un terrain pour y installer un nouveau dépotoir et Gatineau avait des visées sur Cantley.

En 1987, les résidants de Cantley ont décidé de passer à la vitesse supérieure pour faire bouger les choses. Après trois ans d'études, de discussions et de réunions qui les avaient menés au bureau du premier ministre Lévesque, puis à celui du premier ministre Bourassa, c'était toujours le statu quo. Même Jacques Parizeau avait décrit la situation de Cantley comme étant « un très beau cas de cancer ».

Au début de 1987, l'affaire est devenue intéressante. Des résidants de Cantley ont occupé le bureau de Michel Gratton et, le 10 mars, 200 voitures ont bloqué la Route 307. Des médias d'un océan à l'autre ont couvert l'événement. Comme le gouvernement ne voulait pas les représenter, les résidants de Cantley avaient décidé d'élire leurs propres représentants. Le 24 mai, ils ont tenu leurs propres élections, afin d'élire ce qui allait être connu comme le « conseil fantôme », composé de six conseillers et d'un maire (Michel Charbonneau). Ils ont également tenu un référendum; 97 % des gens ont voté en faveur de la séparation. Par la suite, le 26 juillet et le 9 août, des résidants ont bloqué des routes à deux reprises à Wilson's Corners, à la frontière nord de Val-des-Monts. Lors du deuxième barrage, la brigade antiémeute de la Sûreté du Québec est intervenue au nord, et la police de Gatineau au sud. Les manifestants se sont dispersés, mais la scène ridicule diffusée par les médias, soit deux brigades antiémeutes confrontant des manifestants pacifiques, a semblé convaincre des politiciens provinciaux que la situation avait assez duré. Au Québec, le cas de Cantley était décrit comme « le dossier le plus chaud ». Quelques semaines plus tard, le gouvernement annonçait la tenue d'une commission sur l'affaire de Cantley qui serait dirigée par Jérémie Giles.

Le 27 mars 1988, M. Giles publiait son rapport, qui recommandait la séparation. Le ministère des Affaires municipales annonça la tenue d'un référendum portant sur la séparation. Le 18 septembre, 84 % de la population vota en faveur de la séparation. Des négociations eurent lieu avec la Ville de Gatineau. Le 1er janvier 1989, Cantley devint la 1 499e municipalité du Québec. Le 19 mars 1989, des élections eurent lieu afin d'élire six conseillers et un maire (Bernard Bouthillette), soit 2 000 jours après que la « petite gang de Boily » eut entamé sa campagne en faveur de la séparation.

Note de l'auteur :

Un article de quelques centaines de mots ne peut rendre justice aux six années de bataille, aux centaines de réunions et aux milliers d'heures de bénévolat des Cantléens. Je n'ai nommé ici que trois personnes, mais de nombreux résidants ont joué des rôles clés dans la campagne de 1983 à 1989. L'ouvrage de Gérard Bourgeois intitulé « Cantley l'impossible rêve » raconte l'histoire en entier. Vous pouvez vous le procurer auprès de Cantley 1889 (voir www.cantley1889.ca).

Bob McClelland exploite l'une des premières fermes familiales de Cantley qui date des années 1840 et il y vit avec son épouse Sue. Il siège au conseil d'administration de Cantley 1889.

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